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Des priorités agronomiques, écologiques et de santé publique à ne pas glisser sous le tapis, en Bretagne où ailleurs :

 Il faut réduire la vulnérabilité des territoires et ne pas rester sur les reculades environnementales accordées ces dernières semaines !!

 

En agriculture et notamment en élevage, la Bretagne a été la région championne du changement et même des bouleversements durant la deuxième moitié du XXème siècle. Elle a été réactive et même relativement inspirée lorsque, dans les années 90, les premiers problèmes environnementaux ont fortement émergés : algues vertes et nitrates, contamination des eaux par les pesticides (atrazine, lindane,…).

Au prix d’une succession de mesures agronomiques volontaires ou règlementaires, largement négociées, souvent repoussées, les pics de pollutions d’origine agricole de l’eau sont derrière nous. Mais ces pics des années 80-90 étaient excessifs et l’atténuation des contaminations reste insuffisante. Le territoire agricole breton reste largement émetteur de polluants dans l’eau et dans l’air (ammoniac). D’autant qu’avec des «parcellaires modernisés» et des paysages uniformisés les capacités d’auto-épuration de nos territoires sont dégradées et largement insuffisantes. Actuellement la vulnérabilité de la Bretagne est bien trop élevée malgré des mesures de remédiation et les success-stories observées çà et là.  Hélas, même avec la très sérieuse alerte climatique due à la sécheresse de 2022 en Bretagne, les plans de résilience qui se mettent en place sous l’impulsion des divers organismes (notamment Assemblée Bretonne de l’Eau (ABE) et Agence de l’Eau Loire Bretagne) manquent clairement d’ambition et donc de pertinence : mettre des cautères sur des jambes de bois ne nous permettra pas d’avoir tous les ans de l’eau de qualité en quantité suffisante.

Comment peut-on parler de plan de résilience sans revisiter les aménagements urbains et agricoles nos territoires ? Pourtant tout le monde semble être d’accord sur la nécessité de RE-favoriser le stockage de l’eau dans nos sols et nos paysages urbains ou ruraux. Il faut cependant accepter de pratiquer un peu de gymnastique intellectuelle disruptive. En ville des actions intéressantes se mettent en place, mais la tâche est immense après des décennies de bétonisation. En agriculture les chemins pris ne sont pas vraiment ceux d’une vraie résilience. Pourtant regagner de la fertilité des sols ce n’est pas vouloir obtenir la lune. Viser du stockage de carbone et une meilleure structure des sols afin de favoriser le stockage de l’eau à la parcelle est un chemin indispensable. Revisiter nos réseaux hydrographiques à la lueur de l’hydrologie régénérative ou de l’hydraulique douce c’est à la portée de tout agronome,  de tout chargé-e de mission en bassin versant et de tout élu motivé.

Les compétences sont présentes sur le terrain, pourquoi ne pas agir rapidement ? Les enjeux sont pourtant connus de tous ou devraient l’être. La Bretagne doit sortir de la léthargie issue de décennies de co-gestion sur fond de course à la lenteur, voire de désinformations.

 

Il y a trois groupes de sujets qui sont actuellement préoccupants :

 - La protection des aires d’alimentation de captages (AAC) : après avoir été, il y a 3 décennies, la région la plus réactive face aux pollutions diffuses par les pesticides, l'inspiration n'est plus vraiment à l'ordre du jour en Bretagne : la chape de plomb "imposée" par les responsables professionnels agricoles est véritablement efficace en termes de "course à la lenteur" : la mise en place des procédures "captages prioritaires" ne sont pas entièrement finalisées malgré les années et les moyens qui y ont été consacrés. Quand sera-t-il de l'application de la nouvelle directive EDCH ?? Nous devons viser le besoin impératif des AAC sans Phytos (en gardant en réserve que des AAC sans contaminations aux captages serait aussi une grande victoire notamment pour les grandes AAC de surface : AAC Zéro transferts: (pilotages raisonnés, sols, parcelles (tailles, non traitement des bordures), chemins de l'eau,...).

 - Résilience et augmentation des ressources en eau: les différents plans de résilience, ABE, Agence de l'eau, département,...) issus de l'électrochoc dû à la sécheresse de 2022, ne sont pas assez ambitieux. C'est un peu ce que j'exprime dans mon courrier au président du Conseil Régional (pièce- jointe).

Ces plans de résilience sont le résultat de co-construction avec les différentes parties prenantes, Il manque des pans entiers de mesures et les niveaux de ruptures envisagés sont très ténus, alors que le greenwashing est toujours très présent.

 "Nous n'avons qu'une eau" et en agriculture il est illusoire d'aller vers des retenues si les champs sont maltraités et matraqués lors des plantations (pomme de terre et tamisage) ou des récoltes (maïs, choux-fleurs, betteraves,..) ou simplement générateurs de ruissellements excessifs et de coulées de boues par manque de mesures préventives de bons niveaux.

 https://www.guylehenaffagreaunome.fr/2024/02/prairies-permanentes-naturelles-pourquoi-tant-de-mefiance.html

 

 - Accélération des énergies renouvelables : "le rat des champs est-il vraiment condamné à protéger le confort du rat des villes":  l'agrivoltaïsme est évoqué en zones de captages, les agri-méthaniseurs sont globalement les agriculteurs les plus éloignés de l'agroécologie et les plus agressifs sur les milieux, les éoliennes s'invitent dans les secteurs de sources (projet à Kerpert pour le Trieux) et peut-être aussi dans les captages ( !), le bocage bien que fortement porté actuellement présente un risque non négligeable de pillage,...

De façon pragmatique, nous devons pointer les réglementations non appliquées vis-à-vis de la biodiversité et porter des propositions nouvelles et concrètes :

 - exiger l'application des mesures règlementaires de protection de la biodiversité lors de l’application des phytosanitaires : Zones non traitées en bordures de champs. Les grandes AAC en eau de surface doivent être des territoires tests prioritaires (= AAC zéro-transferts)

 - des compensations agroécologiques fortes doivent accompagner les activités et les projets impactants (par exemple la méthanisation largement subventionnée) : réduction des tailles parcellaires, bocage géré durablement et obligation de prairies permanentes.

 - l'agrivoltaïsme n'a rien à faire dans les champs (la souveraineté alimentaire est prioritaire) hélas les revenus sont autrement plus élevés que ceux d'activités agricoles. Les ombrières voltaïques en volailles ne viennent qu’en remplacement des plantations d'arbres et d'arbustes non réalisées depuis des décennies, et ce malgré les besoins largement connus liés au comportement des poules...

- les retenues d'eau ne doivent se concevoir que si l'on fait du préventif avant ou en même temps (hydraulique douce, hydrologie régénérative, réaménagements ruraux,...). Dans ce domaine de l’eau  la règle souhaitable est la suivante : "Un euro de préventif investi pour un euro de curatif dépensé"

 -...

                Comme nombre de concepts souvent vidés de leurs sens, comme l’agriculture raisonnée il y a 20 ans, la résilience de nos territoires ne doit pas être source de marchandages, généralement réducteurs, ni être fondée sur des approches erronées. Les solutions fondées sur la nature permettent une renaturation efficace et peu onéreuse. Bien utilisées, les techniques de génie-écologique nous permettrons de fortement limiter les pollutions diffuses agricoles et humaines et surtout d’être moins impactés par les aléas climatiques de plus en plus nombreux.

Zone de source à protéger (à sanctuariser) : le Trieux à Kerpert-22 (15 mars 2024)

Zone de source à protéger (à sanctuariser) : le Trieux à Kerpert-22 (15 mars 2024)

Tag(s) : #Territoires résilients, #Règlementation phytosanitaire
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